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SOCIETAT E AGROPASTORALISME. Le camp militaire de Canjuers dans le Var, une fabrique à loups. P. Thavaud et D.Carel
28 / 06 / 2018 398 lu(s) 
Le camp militaire de Canjuers dans le Var, fabrique à loups !

   Pascal THAVAUD, ingénieur pastoraliste au CERPAM (Centre d'Etudes et de Réalisations Pastorales Alpes Méditerranée) vient de publier une petite note au sujet du pastoralisme dans le camp de Canjuers, dont je reproduis les principaux chiffres et faits marquants avec son aimable autorisation.

   Loin des discours de propagande des associations pro-loup qui fonctionnent sur le mode de l'adage bien connu « Quand on veut noyer son chien, on dit qu'il a la rage ! ». Entendez : « Si le loup tue des brebis, c'est la faute aux éleveurs qui refusent de s'adapter », ce travail de recension a le mérite de resituer les enjeux réels de la prédation sur un territoire bien délimité et d'en mesurer les conséquences.

   Rappelons que le camp de Canjuers a été créé en 1974 dans le nord du Var à la limite des Alpes Maritimes. En 2017, il regroupe 13 communes sur une surface d'environ 35 000 ha. Il totalise à lui seul la présence de 30% du cheptel ovin et caprin varois.

   2005 a été la première année de présence avérée du prédateur avec 2 ou 3 loups erratiques et 33 brebis victimes de la prédation. Douze ans après, en 2017, on enregistre la présence de 3 à 4 meutes agissantes (plus de 15 loups, données ONCFS) et 600 victimes constatées (soit 60 % des victimes varoises).
   Chiffres beaucoup plus inquiétants : En 2005, 31 060 ha étaient pâturées, soit 100% des unités pastorales au sein du Camp et 30% du territoire pastoral varois. En 2017, ces chiffres étaient réduits à 17 048 ha pâturés, soit une diminution de 45% de la surface des unités pastorales qui ont été abandonnées suite à la présence du prédateur, et ce malgré la mise en place des mesures de protection et la présence des chiens patous, données à l'origine comme la solution miracle à tous les problèmes de prédation.
               Ce que nous dit la note du CERPAM :

   « Après l'expropriation qui a été finalisée en 1974, et une courte interruption de l'activité pastorale, l'autorité militaire a souhaité le retour des troupeaux pour raisons stratégiques (manœuvres) et environnementales (DFCI Défense contre l'incendie). Les éleveurs de Canjuers ont tous leur siège d'exploitation en dehors du camp et sont très fortement dépendants des surfaces pastorales de Canjuers (80% des surfaces pastorales de ces exploitations sont sur Canjuers)
   Le retour  du loup a amené les éleveurs à repenser leurs pratiques pastorales (allotement, mode de gardiennage, parcs, chiens de protection...), à compenser les pertes très importantes depuis 2007 par une forte augmentation du taux de renouvellement de leur cheptel.
   Les contraintes militaires fortes (limitation des périodes de pâturage, interdiction d’accès pour les bergers de certaines zones, règles pyrotechniques) limitent la mise en œuvre de certains moyens de protection, entraînent une fermeture des milieux qui accroît la vulnérabilité des troupeaux.
   On constate une réduction de 45% de la surface pâturée du camp en 10 ans (données POPI CAD, PF et MAEC 2015/2016). Les éleveurs abandonnent les secteurs qui présentent le plus de risques et dans lesquels l'efficacité des chiens de protection est réduite. Les engagements en matière de mesures agro-environnementales (MAEC) qui portent sur 3600 ha d'ouvrages DFCI (prévention incendies) et leurs zones de renfort pourraient être remis en question dans certains secteurs.
   Canjuers avec 3 meutes identifiées est la «  fabrique à loup » du département. Depuis 5 ans les attaques se multiplient. Une nouvelle meute est présumée sur Provence Verdon. Le nombre de victimes augmente partout dans le Var, mais la zone la plus impactée reste sur le camp de Canjuers.
   Malgré l'état catastrophique de cette situation, les éleveurs ne veulent pas baisser les bras.
   En 2017, ils ont mis en place un projet coopératif initié par les 2 POPI (Plan d’Orientation Pastoral Intercommunal) de la Communauté d’agglomération Dracénoise et du Pays de Fayence.
   L’association qu'ils ont créée, regroupe la quasi-totalité des éleveurs présents sur Canjuers, soit 34 adhérents. Elle se donne pour objet la préservation de l'activité pastorale et sylvo-pastorale sur le territoire du camp militaire en organisant la coopération des éleveurs afin :
- de permettre la réouverture des milieux pastoraux et la réalisation d'équipements pastoraux (parcs, bergerie, ..) ;                                    
- d'organiser un suivi et une véritable régulation de la population de loups afin de diminuer sensiblement la pression de prédation ;
- de négocier avec l'Autorité militaire les moyens d'adaptation de la gestion pastorale à l'évolution de l'activité militaire.
   Le conseil d’administration est composé par une nouvelle génération d’éleveurs qui souhaitent s'engager dans une démarche expérimentale permettant de sortir de l'impasse actuelle.”
   On ne peut bien sûr que leur souhaiter de réussir. Tout en sachant que si la France persiste dans sa politique stupide consistant à maintenir canis lupus sous statut d'espèce strictement protégée, alors même que de l'aveu de ses défenseurs l'espèce est très dynamique et recolonise des territoires, le recul et la disparition du pastoralisme de nos territoires est inéluctable, comme le démontre l'exemple de Canjuers.
   Ce n'est donc plus le loup qui est menacé, mais le pastoralisme, et avec lui toute la biodiversité sauvage et domestique qui l'accompagne.
                                                                      Pascal THAVAUD et Denis CAREL
              
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